Jacques Arnould fait une histoire et philosophie des sciences atroces · Peut-être raisonne-t-il à très longs traits ... · Fait-il partie de gens qui me fictionnalisent, malgré moi-même ? · Problèmes en théologie ... · Prendre pour magistère ce qui n'en est pas ... · La présomption de Jacques Arnould · Qu'est-ce que Jacques Arnould entend par "foi" ? · Jacques Arnould peut avoir une intention noble
Il vient d'être cité ou même interviewé en Marianne (n° 1328, 25 - 31.VIII.2022). Il m'arrive à toucher des vieux numéros, c'est aujourd'hui que je le trouve, parmi les autres. Si j'ai bien compris, ce n'est pas Margot Brunet qui l'ait interviewé, il aurait plutôt été cité en Dieu, la contre-enquête par Thomas C. Durand, et ce livre aurait été lu par Margot Brunet.
Ce livre est dirigé contre un autre, par Michel-Yves Bolloré : Dieu, la science, les preuves. La première citation dans l'article "D'après la science ... Dieu n'existe pas !" commence en se référant au livre de Bolloré, ainsi :
Un ouvrage ... qui passerait à la trappe les siècles de progrès qui ont permis la séparation de la science et de la religion. "C'était déjà l'enjeu de la condamnation de Giordano Bruno et du procès de Galilée", rappelle Jacques Arnould ...
Dont je laisse la présentation d'abord à lui-même:
http://jacques-arnould.com/
Tout d'abord, la séparation de la science et de la religion (comme enjeu considéré dans l'abstrait, je reviendrai au cas concret) peut s'avérer autant néfaste que la séparation de l'état et de l'église (entre les carnages de 1905 et les ravages récentes contre les écoles libres et la scolarité à maison, par exemple), autant plus s'il n'y a pas de separation de l'état et de la science, c'est à dire si "La Science" (pas forcément la même chose que les sciences) devient une nouvelle église d'état.
Ensuite, ce n'était nullement l'enjeu dans la condamnation de Bruno. Il était condamné pour sa religion, plutôt que pour sa seule astronomie. Quand on dit que les étoiles sont des soleils autour desquelles il y a plusieurs terres, sur lesquelles il y a d'habitants, comme nous, mais ne descendant pas d'Adam et d'Ève, et que Dieu le fils est le Soleil dans notre monde, et le Saint-Esprit l'âme de chaque monde qui fait tourner les Terres autour du Soleil, ceci peut-être même entendu (je pense que c'est ce qu'on a compris) comme un Fils du Père pour notre Soleil, un autre pour Sirius, encore un autre pour α du Centaure et ainsi de suite dans l'infini* et au moins de faire du panthéisme, on n'est pas brûlé pour sa science d'astronome, mais bel et bien pour la religion qu'on n'en sépare justement pas un-même. Une religion acatholique, reprise par des Franc-Maçons, et en juger du fait qu'ils mettent tellement de valeur sur Bruno et Galilée.
Dans le procès du Galilée, troisièmement, que je connais en partie par les observations pertinentes du Catholique américain Dr. Robert Sungenis (d'origine** italienne), le savant de Pise avait certes argumenté pour telle séparation, sinon devant le juge une fois qu'il dit "non" au moins dans la Lettre à la grande-duchesse Christine. Cette idée a été, dans un procès contre ses thèses sur terre et soleil en 1616 et dans un procès contre lui-même en 1633, condamnée. Dire que la Bible et la Science ne pourraient pas se contredire, parce qu'elles parlent des questions différentes sied très bien à un Kantien, mais depuis ces procès, comme depui St. Thomas, comme depuis toujours, très peu à un Catholique.
Quatrièmement, si j'ai bien compris, ça passe à côté de ce qui constitue le sujet de Dieu, la science, les preuves. Intelligent Design n'est pas une défense de positions bibliques, que ce soit contre Galilée ou contre Darwin, Intelligent Design prend les récits scientifiques (ou les récis des scientifiques) sur ce qui est et qui était tels quels, et ajoute l'observation, que même dans ce scénario, la combinaison de l'espace, du temps, de la matière et de l'énergie ne suffisent pas à expliquer ce qui est. Dieu comme créateur et comme maintenant la création dans son existence est une précondition nécessaire. Chose qui n'était nullement contestée, ni par Bruno, ni par Galilée.
Le premier est brûlé vif en 1600 pour avoir affirmé, notamment, autour desquelles tournent des planètes.***
Pas clair si l'omission gigantesque ici de la pseudo-théologie de Bruno est due à ce qu'écrit Arnould en "contre-enquête" ou juste le résumé par Margot Brunet.
Et, trente-trois ans plus tard, Galilée est forcé de revenir sur sa défense de l'héliocentrisme développé par Copernic : le religion n'était pas prête à reconnaître que la Terre tourne autour du Soleil.
Selon les critères catholiques d'alors, qui en principe n'ont pas été directement changés, la religion catholique ne devrait toujours pas l'être. Et pas non plus pour les thèses de Darwin.
À part "progrès" ce qui exprime une téléologie des tergiversations des savants, et à part la partie sur Bruno, l'histoire de science serait tolérable, mais encore la philosophie des sciences est aussi atroce. Voyons. Quand Margot Brunet vient de parler du "Dieu des lacunes", "Dieu bouche-trou"° qui n'a jamais été tel quel un argument par les théistes, cléricaux ou autres, mais en est la caricature par Nietzsche, elle donne la parole à Jaques Arnould :
"c'est une posture dangéreuse que de mettre Dieu dans ce que la science ne sait pas encore : cela sous-entend que le jour où elle trouvera les réponses, on l'enterrera."
Les argument du dessein intelligent seraient alors "nous ne savons pas encore comment le flagellum des bactéries s'est développé, à partir de cellules sans ce flagellum, donc Dieu l'a fait" ...
Non. L'argument est de complexité irréductible. Nous ne sommes pas en position de ne pas encore savoir comment ça serait apparue par processus évolutifs. Nous somme en position de savoir que ça ne s'est pas produit par des processus évolutifs. Sinon on pourrait argumenter "nous ne savons pas encore comment deux et deux font trois ou quatre fois quatre font cinq" - la vérité étant que nous savons très bien que deux plus deux font quatre et quatre fois quatre font seize, mais Jacques Arnould serait prêt à qualifier ceci de "mathématique eurocentrique bouche-trou" si c'était un argument pour Dieu.
[...] Les collègues qu'il aime se moqueraient de lui, s'il leur disait que, non seulement Dieu existe, mais les processus de jour et nuit, de l'hiver et de l'été En témoignent d'une manière sinon totalement irréductible, au moins réductible seulement par absurdités.
Hans Georg Lundahl
Paris
Mardi Gras
21.II.2023
PS: Jacques Arnould a tenu de protester contre ma spéculation. C'est le deuxième respect qu'il m'a demandé, dans une lettre :
- le respect de mon nom. Rien de bien grave, mais rien non plus de très compliqué, surtout pour un universitaire en linguistique 😉
- le respect de mes choix de vie. Pourquoi avoir inventé que je serais "tellement plus à l'aise parmi les scientifiques par exemple du CNES que devant Dieu dans la liturgie"? Si vous tenez à me juger, faites-le au moins sur des preuves et non sur vos fantaisies.
Pour le premier, déjà corrigé. Pour le second, j'ai des doutes.
Je vais donc lui demander gentiment pourquoi il est tellement avide de faire bloc avec des scientifiques qui ont une relation pour le moins tendue avec la religion chrétienne./HGL
PPS, il vient de me dire qu'il aurait été plus honnête de me baser sur son œuvre "Dieu n'a pas besoin de preuves" déjà parue. Avoué, je n'en ai pas eu accès au moment d'écrire mon article. Selon lui, il n'a que peu à faire que ce soit avec Michel-Yves Bolloré, en polémique, ou que ce soit avec Thomas C. Durand. Ce que je viens d'écrire pourraît donc ne pas lui faire justice./HGL
PPPS - la partie immédiatement jugeable comme indélicate est enlevée, et remplacée par [...]. Tous ces PS et les corrections sont l'œuvre du lendemain, Mercredi des Cendres./HGL
PPPPS - il a prié pour moi à St. Eustache./HGL
PPPPPS - correction de la citation :
Le premier est brûlé vif en 1600 pour avoir affirmé, notamment, que des multitudes d'étoiles existent, autour desquelles tournent des planètes.
Comme dit, faux, il était brûlé pour d'autres raisons./HGL
Notes:
* Certains récents ont voulu faire une rédemption de ceci en qualifiant le Fils comme le même en chaque monde, il paraît qu'au delà de la pure joie d'écrire le Monde de Narnia, C. S. Lewis aussi tenait ceci pour théologiquement probable.
** Sungenis = Sangennisi, dans l'orthographe de Statten Island. Je ne veux pas dire que je ne connaissais pas le procès du tout avant de le lire, mais il donne des détails.
*** La citation tronquée est complêtée dans le PPPPPS.
° La wikipédie anglaise est plus généreuse en citations sur l'origine du concept :
From the 1880s, Friedrich Nietzsche's Thus Spoke Zarathustra, Part Two, "On Priests", said "... into every gap they put their delusion, their stopgap, which they called God". The concept, although not the exact wording, goes back to Henry Drummond, a 19th-century evangelist lecturer, from his 1893 Lowell Lectures on The Ascent of Man. He chastises those Christians who point to the things that science has not explained—"gaps which they will fill up with God"—and urges them to embrace all nature as God's, as the work of "an immanent God, which is the God of Evolution, is infinitely grander than the occasional wonder-worker, who is the God of an old theology."
https://en.wikipedia.org/wiki/God_of_the_gaps
On to:
ReplyDeletePeut-être raisonne-t-il à très longs traits ...