Wednesday 16 September 2015

Véronique Le Ru, lue, répondue

Véronique Le Ru est citée d’après l’article « Le réveil de l’obscurantisme » (La Recherche, n° 498, p. 56) comme ayant dit sur les créationnistes :

Ils cherchent à élever une doctrine idéologique au rang de science, mais aussi à abaisser une science (celle de l’évolution) au rang d’hypothèse.


Véronique Le Ru étant française, et Dominique Jeangille aussi, qui la cite, la question qui se leur pose est bien-sûr, très peu égalitairement, celle du rang auquel une personne ou une thèse est élevée ou abaissée.

Ce qui relève un peu trop de métaargument, quand il s’agit des thèses.

Je me pose moins la question de « théorie » ou « hypothèse » ou « doctrine idéologique » (au moins prétendument telle) que de vérité ou fausseté.

Maintenant à sa réponse (à Dominique) à la page 6 du n°501 :

Une hypothèse est une idée risquée par une ou un scientifique pour resoudre un problème, une contradiction entre ce que l’on sait et ce que l’on voit.


Ce qu’on sait peut donc contredire ce qu’on voit ? Et comment savoir une chose non vue ?

Est-ce que ça date dès l’acceptation de l’héliocentrisme comme « savoir », ça ?

Pour cela, on élabore une hypothèse que l’on cherche à vérifier ou infirmer par l’expérience.


Vérifier et falsifier revient à invoquer le principe de la contradiction, d’invoquer la logique.

Par expérience veut dire qu’on cherche de voir des choses (ou entendre, ou renifler ou palper, mais normalement assez souvent voir).

L’expérience ne peut pas avoir une place réellement aussi baisse qu’une chose sue puisse la contredire, si elle sert à corriger potentiellement une hypothèse erronée.

Et puisque la correction est qualifiée d’infirmer, la conséquence logique non plus ne peut pas avoir une place réellement aussi basse qu’elle ne puisse pas déjà avant l’expérience corriger une hypothèse qui est erronée car contradictoire, en elle-même ou en ses conséquences ou entre elle et sa base épistémique.

L’implication logique, comme l’expérience, est donc une source de vérité antérieure philosophiquement à cette recherche scientifique. Ou à ses résultats. D’où l’intérêt d’un non-scientifique, non-expert qui révise la logique des scientifiques.

Si l’hypothèse est infirmée, ou falsifié (selon Popper), on en essaie une autre.
Comme démarche individuelle, ceci est louable.

Comme démarche collective, ce ne l’est plus.

L’homme est limité de quelque façon par ses convictions, et il n’est pas en train tout le temps de vérifier ou falsifier les hypothèses auxquelles il ne croit pas.

Par contre, si deux hommes ont des hypothèses diverses, rien ne les oblige à vérifier ou falsifier ensemble celle de l’un avant de commencer à mettre l’autre hypothèse à l’épreuve. Ils peuvent diversifier leurs travaux et faire un débat.

Donc, on essaie, collectivement parlé, d’essayer une autre hypothèse bien avant l’échec final d’une hypothèse rivale.

Ce que les créationnistes ont bel et bien fait par rapport aux évolutionnistes. C’est pour cette démarche louable que Véronique Le Ru les qualifie d’obscurantistes ou leur reproche de vouloir élever le bas (dans le jugement d’elle-même) et de vouloir abaisser le haut (aussi dans son propre jugement).

Si elle est validée, elle devient énoncé d’une loi scientifique qui s’intègre dans une théorie, constituée de plusieurs lois.


L’évolutionnisme est bien davantage qu’un ensemble de lois. Il ne s’agit pas d’un manuel incomplêt pour l’électroingénieur, encore à compléter par ses études en manipulations possibles des lois de l’électromagnétisme et en risques associés à ses possibles manipulations. Non, il s’agit d’un récit, d’une histoire qu’on avale aussi facilement que la Genèse – précisément comme récit.

Véronique admet que les théories se succèdent. Ce qui est au moins vrai socialement. Ensuite :

Cela n’empêche pas que depuis 1859 la théorie darwinienne est consolidée et corroborée par des nouvelles connaissances en biologie moléculaire.


D’autres diraient, et entre eux ou nous précisément des créationnistes, que les nouvelles connaissances en biologie moléculaire, soit ne sont au moins pas un nouvel argument pour le darwinisme (quoique pour les darwinistes elles donnent davantage de détail à leur thèse), soit est même un nouvel argument contre le darwinisme (contre Oparin, contre la diversification illimitée en deux sens du nombre limité des chromosomes, requise par le darwinisme).

Ce n’est donc pas une simple hypothèse (à l’encontre de l’hypothèse de la mémoire de l’eau par exemple), mais la théorie admise comme la science normale (selon Thomas Kuhn), universellement reconnue comme vraie aujourd’hui.


En vérifiant à la wikipédie, il me semble que Véronique doit davantage à Kuhn* qu’à Popper.



Déjà que le paradigm shift est décrit comme uniformement provoqué par chaque fois une anomalie, comme que celle-ci provoque une crise chez les scientifiques, comme que seulement celle-ci donne lieu à la naissance d’un nouveau paradigme par la science extraordinaire car rare, comme que celle-ci donne lieu à une « science normale », et après ceci l’adoptation d’un paradigme est unanime.

Hé, halo, on est des hommes, pas des machines ! Ça vaut pour les scientifiques aussi !

L’anomalie peut être déjà présente depuis longtemps dans le paradigme accepté comme « science normale », elle peut être ignorée de manière de ne pas provoquer une crise parmi les scientifiques, et la science rare est extraordinaire peut rester vraie et correcte sans être pour autant en train de devenir « science normale ».

Ce que réclament les créationnistes est justement que le créationnisme constitue, dans les termes de Kuhn (mais ils ne les utilisent pas toujours) une « science extraordinaire (car rare) ».

Et ceci sans être en train de devenir socialement « science normale », car les adeptes de celle-ci sont soudés. Et capable d’ignorer et de faire taire pas mal d’anomalies, pour le plaisir social de rester « science normale ».

Vous pensez que ce sont plutôt pseudoscientifiques avec une pseudoscience extraordinaire car heureusement rare ? Bon, c’est ce que nous les créationnistes pensons de Darwin à son époque.

Et si, au lieu de me bombarder avec des bonnasseries et niaiseries sur darwinisme comme science normale "jamais refutée depuis 1859" on commençait à s'intéresser un peu pour les réfutations?** Les français sont capables de ça aussi? On espère, au moins?

Hans Georg Lundahl
BU de Nanterre
Sts Corneille de Rome
et Cyprien de Carthage
13-IX-2015

* Diagramme cité: « Kuhn » par ValehAMIRI TPTTravail personnel. Sous licence CC BY-SA 3.0 via Wikimedia Commons.

** Pas mal en anglais sur mon blog Creationniste, par exemple:

Creation vs. Evolution
http://creavsevolu.blogspot.com


Et en français en peu moins, sur d'autres blogs mais collectionné sur cette page:

Pour francophones tendance monoglottes, sur d'autres blogs
http://creavsevolu.blogspot.com/2010/06/pour-francophones-tendance-monoglottes.html

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